Le projet DRyaDS porté par Léo Varnet, chercheur au Laboratoire des Systèmes Perceptifs, et Alessandro Tavano, chercheur au Max Planck Institute, a été sélectionné dans la cadre de l'appel à projets franco-allemand en sciences humaines et sociales ANR-DFG (FRAL). Il s'agit d'un projet comparatif sur la dynamique du suivi de la parole, en français et en allemand.
DRhyaDS, un projet à la frontière entre traitement du signal, psycholinguistique et neurolinguistique
Lorsque nous percevons un son de parole, par exemple lors d'une conversation, notre cerveau doit en premier lieu isoler la voix de notre interlocuteur des autres sources sonores, et suivre sa dynamique. Cette tâche n'est pas facile car les rythmes de la parole sont multiples et étroitement reliés (par exemple, le débit des phonèmes, des syllabes ou des mots). Comment parvenons-nous à suivre et à décoder la parole dans une situation d'écoute naturelle ? Selon l'hypothèse qui prévaut actuellement, le cerveau humain serait capable de se synchroniser avec les modulations temporelles dans le son de parole perçu (autour de 3-4 Hz). Cependant cette conception ne permet pas de rendre compte de la grande dynamique de la parole spontanée qui contient des rythmes extrêmement irréguliers (du fait notamment de la présence de silences, et d'interruptions) et largement variables selon le locuteur, le type de discours et les caractéristiques du langage.
L'hypothèse de recherche centrale de ce projet est que la perception des rythmes paroliers par le cerveau humain ne se limite pas à une association univoque entre une fréquence de modulation d'enveloppe particulière dans le signal de parole et une unité linguistique: les motifs rythmiques qui sous-tendent la perception des phonèmes, des syllabes et des mots montrant en réalité un grande variabilité entre stimuli. Ainsi, ce projet remet en question la conception selon laquelle il existerait un rythme particulier permettant à l'activité cérébrale de se synchroniser avec la parole, et propose à la place un nouveau cadre théorique et expérimental pour rendre compte des mécanismes qui sous-tendent la perception des modulations temporelles lentes de la parole et leur dynamique; l'effet des caractéristiques linguistiques particulières, en prenant le français comme exemple de langue syllabique et l'allemand comme exemple de langue accentuelle; comment le cerveau humain parvient à suivre et à encoder cette dynamique.
A la frontière entre traitement du signal, psycholinguistique et neurolinguistique, le projet DRhyaDS a le potentiel de rénover profondément l'approche théorique de la perception de la parole, ainsi que les pratiques et méthodologies de ce champ de recherche. Ceci est rendu possible par la grande complémentarité des expertises du consortium franco-allemand, ainsi que la possibilité de tester des locuteurs natifs des deux langues à chaque étape du projet.
POUR EN SAVOIR PLUS
Léo Varnet s’intéresse principalement à la perception auditive (sons paroliers et non-paroliers) et au développement de techniques statistiques et de traitement de signal pour la recherche. Ses travaux portent principalement sur l’étude des processus cognitifs permettant la compréhension des phonèmes, ainsi que sur la perception des modulations d’amplitude et des modulations de fréquence par le système auditif chez les personnes normo-entendantes et malentendantes.
Site internet de Léo Varnet "De Bouche à Oreille"
Alessandro Tavano s'intéresse à la manière dont le temps façonne la perception et la cognition.